Black Immigrant Daily News
André-Marc Belvon
Image des ruines de l’usine du François, avant démolition. Un centre commercial se trouve aujourd’hui à l’emplacement. • ARCHIVES TERRITORIALES DE MARTINIQUE
Richesse et opulence pour une infime minorité, d’un côté ; misère pour le plus grand nombre, de l’autre ; alors que la Martinique était en proie à la crise. Tous les ingrédients d’une explosion sociale se trouvaient réunis. La première grande grève des travailleurs de la canne, qui alimentait la première industrie du pays, fut durement réprimée au François le 8 février 1900. Dix grévistes furent tués.
«Aujourd’hui, ils sont assez éclairés pour ne pas
former de bandes, pour aller soi-disant saboter l’usine, pour
revendiquer des droits. Non ! Si opprimés qu’ils puissent en
réalité être ; ils éviteront ces affreux massacres qui, en l’année
1900, tâchèrent notre histoire coloniale ». Ces écrits sont
dans le numéro du 27 janvier 1923 de l’hebdomadaire communiste
Justice alors que les ouvriers agricoles du Nord-Atlantique
commençaient à manifester leur colère face à des usiniers et
propriétaires terriens qui maintenaient des salaires de misère. Le
vendredi 9 février 1923, aux abords de l’usine de Bassignac à
Trinité, des gendarmes brandissaient des fusils et tiraient sur des
ouvriers armés de bâtons et coutelas. Deux d’entre eux furent
tués.
Les horreurs de la grande grève de 1900, qui
étaient encore très présentes dans les esprits, se répétaient.
23 ans plus tôt, à la même période de la récolte,
la Martinique avait connu la première grande grève des travailleurs
de la canne qui se voyaient contraints de supporter tout le poids
de la crise sucrière qui s’était installée. La canne occupait près
de la moitié des terres cultivées, l’autre moitié l’était par les
cultures vivrières. Les prémices de cette crise étaient apparues
dès 1883. Le prix du sucre n’avait cessé de se dégrader. La
Martinique s’appauvrissait. Mais comme l’écrit Armand Nicolas dans
« Histoire de Martinique » (1), « dans une Martinique en proie
à la crise, richesse et opulence pour une infime minorité, misère,
souvent atroce, pour le plus grand nombre. Arrogance et mépris d’un
côté, qui se traduisait par des brimades, des vexations. De
l’autre, une résignation et une soumission apparentes. Mais tous
les ingrédients d’une explosion se trouvaient réunis ». Elle se
produira en février 1900.
Jusqu’à l’embrasement
Le premier acte…
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